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Les idées erronées ne sauraient nous tromper. Elles nous séduisent, peut-être, et nous entraînent parfois sur des voies sans issue, mais ce n’est pas l’erreur en elles qui nous égare car ce n’est pas elle qui nous convainc: c’est la part que nous leur reconnaissons de raison et de vérité. Nous n’avons rien à craindre de ce qui est évidemment faux; nous l’écartons sans peine, ou nous le corrigeons. C’est le vrai qui est redoutable et, plus que le vrai, le vraisemblable. La théorie géocentrique de l’univers avait pour elle la poésie de l’aube, la splendeur du crépuscule et la course du soleil dans le ciel du point du jour à son déclin. L’observation du mouvement était juste, son interprétation demeurait naïve. Elle n’aurait pas résisté longtemps aux travaux des astronomes si elle n’avait bénéficié du soutien des puissants, des princes de l’Eglise notamment, qui protégeaient alors leur mauvaise foi par le feu et par le sang. Ils pensaient peut-être que s’ils cédaient sur un point ils risquaient d’être amenés à capituler sur tous les autres et qu’ils perdraient dans ce combat tout à la fois leur pouvoir, leurs richesses et leur autorité. L’avenir a montré combien ces craintes étaient fondées. D’autres idées, d’autres idoles ont, depuis ce temps, injustement gouverné le monde. Si l’Egalité naguère régnait à l’Est, à l’Ouest nous étions — nous sommes toujours — sous l’emprise de la Liberté.
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