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Là où l’Occidental voit des corps solides, stables et durables, des objets auxquels il assigne une place fixe dans le devisement du monde, le Chinois perçoit des phénomènes dynamiques, des flux d’énergie, des échanges, des mutations. Le regard volontiers tourné vers l’intérieur, il est attentif aux changements qu’il observe en lui autant qu’aux variations du milieu où il évolue. Au culte de l’objet il préfère, pourrait-on dire, la culture du sujet. Je m’empresse d’ajouter — je devrais citer ici tous les ouvrages de François Jullien, mais je pense plus particulièrement à son Dialogue sur la morale — que la notion de sujet, en Chine, ne s’arrête pas aux limites de la personne, qu’elle n’en fait pas un individu isolé, coupé du reste du monde, mais qu’elle s’étend au contraire, et l’unit de proche en proche, à l’univers entier. L’introspection est alors le plus sûr moyen de découvrir les autres dans ce qu’ils ont de plus profond. Le for intérieur, si l’on y réfléchit, est tout sauf un lieu fermé: c’est le forum, qui est, à l’image des places publiques de l’ancienne Rome — ou de celles qui aujourd’hui encore, en Italie, s’animent d’une nouvelle vie tandis que le jour décline —, un lieu de rencontres, d’échanges et de débats. Nous n’y sommes pas seuls.
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